Rob Curry était au Katorza vendredi soir pour nous parler de son film Tempest. Extrait de la rencontre avec le public.

Rob : Tout d’abord merci d’être venus. Nous avons mis 4 ans à tourner ce film et nous l’avons fait en même temps que nous tournions d’autres films, dans les temps-morts et avec les restes de budget des autres films.

Comment êtes-vous entré dans le projet ? Est-ce que vous avez eu l’idée d’abord ou est-ce que vous avez rencontré ce groupe en premier ?
On voulait faire un film sur Shakespeare et sur la jeunesse. Je connaissais quelqu’un qui travaillait au théâtre de l’Ovale et qui m’a présenté ce groupe. C’est donc notre idée mais on l’a réalisée avec le groupe du théâtre.

Est-ce que L’Esquive d’Abdellatif Kechiche, sur la recherche des jeunes pour s’accaparer une pièce classique, a influencé votre travail ?
Non, je n’en ai jamais entendu parler.

Qui est le metteur en scène de ces jeunes ? Il réalise un travail de réflexion sur les personnages qui est impressionnant. Est-ce que c’est une technique courante en Angleterre ou est-ce que c’est son style personnel ?
On était trois metteurs en scène : mon co-réalisateur Antony

[Fletcher], Nikolaï et moi-même. J’ai beaucoup travaillé avec Shakespeare, j’ai mis en scène plusieurs de ses pièces et c’est une méthode que j’ai trouvée pour que le jeu des acteurs soit plus naturel. En général en Grande-Bretagne Shakespeare est vénéré donc le style des acteurs est souvent formel. Il est très difficile pour ceux qui ne sont pas formés pour comprendre Shakespeare de se sentir proche de cette pièce.

Pourquoi les scènes en intérieur sont en noir et blanc ?
Il fallait faire une distinction entre les trois lieux de tournage : la salle de répétition, le parc et le théâtre. On trouvait que la salle de répétition marchait mieux en noir et blanc, donc c’est juste parce que ça rendait bien.

Pourquoi choisir cette pièce de Shakespeare plutôt qu’un classique tel que Roméo et Juliette ?
Il y a trois raisons. D’abord parce que The Tempest est la première œuvre en anglais qui parle de la découverte du Nouveau Monde et de la colonisation. On voulait faire un film sur le multiculturalisme en Grande-Bretagne, donc cela correspondait bien au thème de la pièce. Ensuite parce que c’est une pièce qui est facile à faire en groupe puisqu’il y a beaucoup de personnages importants. Il n’y a pas un acteur qui a plus de répliques que les autres. Et enfin parce que c’est la dernière grande pièce de Shakespeare. C’est donc le point de vue d’un vieil homme qui regarde en arrière sur son passé. C’est un bon contraste avec ces jeunes qui débutent dans la vie, c’est très parlant. Ah oui ! Une dernière raison : parce que le thème central de la pièce est la réconciliation, et qu’il s’agit de quelque chose de très important dans la société anglaise aujourd’hui

Pourquoi avoir pris deux acteurs pour jouer Caliban ?
C’est une question difficile ! J’ai fait une production de Hamlet il y a quelques années avec deux acteurs qui jouaient le rôle de Hamlet. L’idée était que le personnage avait beaucoup de monologues et qu’ainsi on pouvait montrer le côté fort et le côté faible du personnage. Dans The Tempest, la mère de Caliban est morte donc il est resté longtemps seul sur l’île avant l’arrivée de Prospero. Pour ne pas devenir fou j’ai donc imaginé qu’il s’était créé un autre personnage pour lui parler. Au début on ne voulait pas faire 7 Ariel et 2 Caliban à la fois. Mais on avait une personne en plus dans le groupe, donc ça s’est fait comme ça.

Propos recueillis par Marina Mendoza Vienne.