Échange avec le réalisateur de I, Anna, mercredi dernier. Vos questions, cher public, et ses réponses…
Ce film est-il le fruit d’un projet familial ou individuel?
Et bien pour ceux qui ne le savaient pas, Charlotte Rampling est ma mère. En lisant le livre, j’ai tout de suite pensé qu’elle seule pouvait interpréter le rôle d’Anna. Je lui en ai parlé et lui ai envoyé un résumé du récit (qu’elle n’avait pas lu) et, contre toute attente, elle a refusé le projet de but en blanc. Après l’adaptation du scénario, elle a compris ce que je voulais concrètement faire du récit à l’écran et a finalement accepté. Ce projet, pour moi, est avant tout familial, dans le sens où je n’aurais pas réalisé le film sans elle.
Je ne connais pas votre filmographie, avez-vous déjà réalisé des films?
« I, Anna » est mon premier long métrage.
Cependant, je vis en Angleterre depuis quinze ans et je fais de la télévision là-bas, plus particulièrement des séries dramatiques et des comédies. Ce film est un peu un départ pour moi.
Vous avez dit que ce film s’inspirait de références cinématographiques françaises? Quels films aviez-vous en tête?
Mes deux références principales sont « Max et les ferrailleurs » de Claude Sautet et « le choix des armes » d’Alain Corneau. Ce sont des films que j’ai vus étant très jeune et qui m’ont beaucoup marqué. A titre anecdotique, j’ai vu « Max et les ferrailleurs » caché derrière la porte du salon alors que mes parents m’avaient ordonné de me coucher (rire).
Pensez-vous que votre film doit être vu plusieurs fois pour être apprécié à sa juste valeur?
Au cours du montage, beaucoup de débats ont eu lieu sur ce qui pouvait être présenté et j’ai dû retirer pas mal de choses, car le plus important est de réaliser un film qui s’apprécie dès la première projection. Toutefois, les films que j’aime sont ceux que l’on peut revoir plusieurs fois avec une optique différente.
Qu’en est-il du choix concernant le lieu du tournage?
Le quartier de Londres, the Barbican, dans lequel a été tourné le film, m’est apparu comme le lieu idéal pour le tourner. Il s’agit d’un quartier indépendant, un peu comme le Vatican à Rome ; c’est en quelque sorte « une ville dans la ville ». Ce quartier a une architecture singulière, une police qui lui est propre et des routes privées. Il offre un univers opprimant, d’ailleurs il a été fermé aux tournages pendant dix ans. Les grandes tours du quartier ont créé un univers sonore des plus inquiétants, le vent tournait comme un ouragan dans la cité. N’étant pas originaire de Londres, je voulais retrouver le sentiment que j’avais éprouvé en arrivant dans cette ville la première fois.
Avez-vous discuté avec votre mère du film « Sous le sable » de François Ozon (dans lequel elle a joué), le thème du déni y étant également présent ?
Concernant la thématique, elle n’a pas comparé les deux projets. D’un point de vue émotionnel, mon film et celui de François Ozon sont pourtant très liés à ses yeux. Charlotte Rampling réagit à l’instinct et le sentiment qu’elle a éprouvé en acceptant de jouer dans mon film « I, Anna » était proche de celui ressenti au moment où elle a accepté le film de François Ozon.
Propos recueillis par Agnès Duthu