Compte rendu du Q&A du Jeudi 8 décembre pour «  The Passing » (début de la séance à 20h45)

en présence des trois acteurs principaux : Dyfan Dwyfor, Annes Elwy et Mark Lewis Jones.

 

Pour quelles raisons le titre « The Passing » a-t-il été choisi ? Que signifie t-il ?

Durant le tournage, le film n’avait pas ce titre. Il s’intitulait simplement « Stanley », le nom du personnage interprété par  Mark Lewis Jones. Ce n’est qu’après le tournage, lors de sa mise en salle, que le nom a changé pour devenir « The Passing ». En réalité, ce titre est une traduction du terme gallois « YR YMADAWIAD ».  Mark Lewis Jones a fait la remarque que le titre gallois avait plus de force et qu’il signifiait davantage « The Leaving ».

N.B. : « The Passing » peut renvoyer à la mort, à celui qui vient de mourir. C’est un euphémisme qui atténue l’idée de mort. La traduction proposée par Mark Lewis Jones, « The Leaving », renvoie davantage à l’idée de départ, d’un passage d’un état à un autre.

Est-ce que les personnages représentent autre chose ? Est-ce que cette idée a pu influencer la façon de jouer ?

Pour Mark Lewis Jones qui joue donc Stanley, la question ne se pose pas vraiment. En tant qu’acteur, il joue le rôle qu’on lui donne. Il a donc tenté d’être le plus littéral possible. Cependant, si le personnage a d’autres significations, cela est forcément enrichissant car plusieurs niveaux de lecture sont alors proposés.

Un autre contexte politique spécifique aux pays de Galles, et peu connu pour un public français, est en œuvre dans le film. Pouvez-vous en donner des explications ?

Dans le film, l’eau a une place centrale. Il n’y a que peu de plans où on ne voit pas d’eau, au point que l’on peut dire que le film se passe sous l’eau. De façon légère néanmoins, on trouve un certain nombre de référence à ce qui s’est passé dans les années 50. Des vallées galloises ont été délibérément inondées pour que des villes anglaises comme Liverpool puissent avoir de l’eau. Des villages gallois ont alors été  complètement détruits par les eaux. Les autorités anglaises du moment ont laissé le choix aux habitants de déterrer leurs morts ou bien de les laisser et de faire couler une dalle pour les protéger. On retrouve cette dernière partie de l’Histoire dans l’histoire particulière de Stanley qui, alors que ses parents sont partis, n’a pas voulu laisser son frère.

Est-ce que le film a provoqué un débat au pays de Galles ?

Non, cela n’a pas provoqué beaucoup de débat. Les gens impliqués politiquement parlent le gallois et connaissent déjà cet épisode. Pour  Annes Elwy qui joue le personnage de Sara, étant donné que sa mère l’a sensibilisée dès sa petite enfance à cette question, il lui aurait été impossible de ne pas connaître ce qui s’était passé  mais elle a des amis qui parlent uniquement anglais et qui sont totalement passés à côté de ce sens. Il semble que cela soit une question d’éducation. Des enfants ayant seulement été à l’école peuvent très bien ne jamais avoir connaissance de cet épisode de l’Histoire galloise. Finalement, le film parle autant de l’histoire d’un homme qui creuse un puits, d’un couple incestueux que de l’Histoire galloise. Il y a différents niveaux de lecture.

Est-ce que le réalisateur, Gareth Bryn, a fait d’autres films d’un autre domaine que celui du fantastique ?

Il s’agit de son premier film. Il a, néanmoins, tourné un série avec le même producteur. Le titre de cette série est «  Hinterland », c’est une série policière également galloise.

Où a été tourné le film ? Dans quelle partie du pays de Galles ?

Le film a été tourné au cœur du pays de Galles, vraiment au centre.

Le film est en langue galloise, cela a t-il été un problème pour sa réception ?

Sur une population de 4 millions, on a 300 000 locuteurs au pays de Galles. Selon Annes Elwy, cela n’a pas été un problème de jouer en langue galloise. Elle a grandi en parlant la langue, elle a été à l’école et elle a été éduquée en langue galloise.

Mark Lewis Jones a ajouté que, depuis quelques années, il y a de plus en plus de séries et d’émissions de télévisions en langue galloise. Mais, finalement, la langue n’a que peu d’importance. Le film est soutenu par des thèmes qui peuvent raisonner même pour des locuteurs et des cultures différents. Cela étant dit,  Mark Lewis Jones a le sentiment que ce film n’aurait pas pu être tourné dans une autre langue que le gallois.

Est-ce important pour vous de jouer en langue galloise ?

Pour Dyfan Dwyfor, l’interprète d’Iwan, s’il a aimé jouer en gallois, ce n’est pas pour cela qu’il a choisi le rôle. Il choisit un rôle pour son personnage avant tout. D’autre part, l’industrie galloise du film est petite donc ils regardent tous les scénarios gallois ou non.

Annes Elwy a beaucoup aimé joué en gallois. Elle a trouvé cela très intéressant parce que la connexion est différente lorsque l’on joue dans la langue dans laquelle on a été élevé. On ressent des choses différentes et on peut mieux les rendre.

Mark Lewis Jones a confessé avoir pris le rôle qu’on lui offrait alors sans se préoccuper de la langue. Si le rôle s’avère être en gallois, alors ce n’est que du bonus pour lui mais, comme pour les autres, il choisit d’abord un rôle. Cela étant dit, les rôles dont il est le plus fier sont effectivement en langue galloise.

Quelles ont été les plus grandes difficultés durant le tournage ?

Pour Dyfan Dwyfor, cela a très certainement été le fait d’être constamment mouillé. Ils ont tourné dans une endroit reculé durant presque 3 semaines ½. Il se souvient qu’ils étaient souvent tous rassemblés autour d’un réchaud.

Pour Annes Elwy, il s’agissait de son tout premier film, elle venait juste de finir l’école en été. Sa principale difficulté concernait le fait de jouer devant une caméra. Elle s’est inquiétée du résultat jusqu’à ce qu’elle le voie enfin.

Pour Mark Lewis Jones, l’ensemble du tournage a été une expérience très positive. Ses inquiétudes ont surtout reposé sur le fait de donner une progression à son personnage, de donner progressivement des détails et de maintenir le fil conducteur entre son personnage et l’histoire.

Comment avez-vous travaillé vos personnages ? Avez-vous pris en compte l’évolution de l’histoire, notamment pour les révélations sur l’inceste ?

Dyfan Dwyfor a préféré ne pas se poser la question de l’inceste et jouer d’abord un couple amoureux. Il ne voulait pas que cela vienne interférer dans son jeu. Le réalisateur voulait, d’ailleurs, conserver le secret le plus longtemps possible. Pour le travail sur son personnage, cela est difficile de se souvenir. Cela fait déjà deux ans que le film a été tourné alors, pour Dyfan Dwyfor, c’est un peu comme regarder une photographie et essayer de reconstruire le souvenir de ce moment précis.

Mark Lewis Jones a voulu ajouter que le décor, est complètement réel, à l’exception du puits. Il leur a donc davantage été possible d’habiter les lieux.

Dans plusieurs articles, des comparaisons ont été faites entre le personnage de Stanley et celui de Norman Bates de « Psychose » d’Alfred Hitchcock. Qu’en pensez-vous ?

Mark Lewis Jones, l’interprète de Stanley, comprend l’origine de cette comparaison. Les deux personnages sont des solitaires, prisonniers d’une maison et de son passé. Ce sont tous deux des personnages ambigus. Dans «  The Passing », on ne sait pas vraiment qui est le méchant.

 

Propos recueillis par Julie Tinant.